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LETTRE DU 18 AVRIL 2002

Les conditions dans lesquelles s’est déroulée la garde à vue du 14 novembre 2001 m’ont incité à écrire à la Ligue des droits de l’homme.

Cette association édite des publications dans lesquelles elle présente, non seulement son point de vue sur la législation pénale (et son évolution souhaitable, si l’on prend comme critère les droits de l’homme), mais aussi des cas particuliers de violation des droits de l’homme, afin d’informer les lecteurs de ces publications, et d’apporter ainsi un soutien moral, ténu mais réel, aux victimes qui, sans ce soutien, resteraient totalement inconnues et démunies.

La garde à vue du 14 novembre 2001 soulève plusieurs problèmes juridiques :

  • après le dépôt d’une plainte avec constitution de partie civile, l’instruction de la plainte relève exclusivement du juge d’instruction (et non plus du parquet), et le juge d’instruction communique avec la partie civile soit par lettre recommandée, soit par audition dans les locaux du tribunal de grande instance (art. 82-1 et 152, alinéa 2, du code de procédure pénale), mais pas par convocation dans un commissariat ;
  • les menaces exercées à l’encontre des victimes sont sanctionnées par le code pénal ;
  • contrairement à l’engagement écrit que le commissariat m’avait fait signer lors de l’audition du 12 janvier 2000, un justiciable qui porte plainte au pénal n’est pas obligé de prendre un avocat, et l’absence d’un avocat pour l’assister n’entraîne pas « automatiquement » le classement sans suite de la plainte ;
  • une convocation de police adressée postérieurement à la date d’audition n’a aucune valeur ;
  • etc.

La réponse du service juridique de la Ligue des droits de l’homme a été rapide, mais décevante.

Le premier paragraphe concerne un problème administratif, sans grand intérêt aujourd’hui.

Le deuxième paragraphe évoque la violation des droits de l’homme et les problèmes juridiques qui avaient été signalés dans ma demande.

  1. Pour ce qui concerne ma demande de signaler les faits dans les publications de la Ligue des droits de l’homme, il m’a été répondu que « dans le cadre de toute procédure, seul un avocat est habilité à assurer la défense de [mes] intérêts ».

    On comprend aisément que cette association ne peut rémunérer les avocats de toutes les personnes, fort nombreuses, qui sont victimes de violations des droits de l’homme.

    Le refus, d’ailleurs implicite, de mentionner l’incident dans les publications de l’association est plus difficile à comprendre.

    A lui, seul le style sarcastique des deux rapports de police montre que la garde à vue du 14 novembre 2001 n’était pas justifiée par des impératifs judiciaires ou policiers, mais qu’il s’agissait d’intimider la partie civile et de l’inciter à se désister de sa plainte.

    L’article 434-5 du code pénal sanctionne les menaces exercées à l’encontre de la victime d’une infraction, dans le but de l’inciter à se rétracter. Cerner un promeneur par plusieurs véhicules de police et par une dizaine de policiers, effectuer sans nécessité une « palpation de sécurité » et une vérification d’identité est bien une action destinée à intimider.

    Un entrefilet dans les publications de l’association était donc concevable

  2. Pour ce qui concerne l’article 152, alinéa 2, du code de procédure pénale, la réponse de la Ligue des droits de l’homme est très étonnante, parce que, en avril 2000, l’article 152, alinéa 2, du code de procédure pénale était rédigé comme suit :

    « (…) les officiers de police judiciaire (…) ne peuvent procéder à l’audition des parties civiles (…) qu’à la demande ce celles-ci ».

D’une part, je n’ai jamais demandé à être auditionné dans le commissariat de Maisons-Alfort, ou dans un autre.

D’autre part, ce texte de loi fait allusion à des « officiers de police judiciaire » et non pas à des gardiens de la paix ; ceux-ci ne sont pas autorisés à assumer les missions réservées aux officiers de police judiciaire.

Les auteurs des deux rapports de police ne revendiquent à aucun moment la qualité d’officier de police judiciaire. Selon leurs propres déclarations écrites, ils sont « gardiens de la paix ».

De plus, cet article 152, pas plus qu’un autre, ne prévoit que le juge d’instruction pourrait notifier ses actes de procédure à la partie civile par voie de convocation dans un commissariat. Tous les actes du juge d’instruction doivent être adressés à la partie civile par lettre recommandée.

Enfin, la garde à vue est qualifiée modestement de « notification (…) d’un acte du juge d’instruction ».

Affirmer aussi hardiment que « nulle violation de procédure ne saurait être ici relevée » est très décevant.

Une telle réponse aurait pu être faite par l’avocat de la préfecture de police.

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