Le juge d’instruction Marc RIVET a renvoyé le maire d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) devant le tribunal correctionnel, pour détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêts. Un agent de catégorie C aurait été promu attaché territorial (c’est-à-dire : agent de catégorie A), avec un salaire mensuel de 4 400 euros, ce qui est contraire aux règles statutaires de la fonction publique territoriale.
Selon l’ordonnance de renvoi, dont la presse a eu connaissance, il y aurait dans cette mairie « (…) un somptueux mélange d’autocratie, de népotisme et de désinvolture dans l’engagement des deniers publics ».
Le maire (Mme M. J.-M., 74 ans) soutient que les postes rattachés au cabinet du maire sont soumis à des règles dérogatoires, ce qui est exact. La question est donc de savoir si ce poste d’agent de catégorie C correspond à un emploi statutaire (un salaire de cadre A est alors contraire aux statuts, donc illégal) ou à un emploi de cabinet (dans ce cas, la rémunération du salarié est fixée librement par le maire, dans le cadre de l’enveloppe budgétaire affectée aux emplois de cabinet).
On ne comprend pas bien que le fait de recruter un agent de catégorie C sur un poste de catégorie A serait illégal à Aix-en-Provence, alors que, selon les juridictions françaises (chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris [arrêt n° 2012/04867 du 31 octobre 2012 confirmant une ordonnance de non-lieu] et la chambre criminelle de la Cour de cassation [arrêt n° E-13-82.488-F-N du 30 octobre 2013]), cette pratique serait légale à Bobigny, au conseil général de la Seine-Saint-Denis, pour le motif que le président de ce conseil général souhaitait ardemment devenir président de l’Assemblée nationale.
De même, les postes de cadres sont réservés aux fonctionnaires : un agent contractuel de catégorie A ne peut être recruté que pour une durée d’une année, renouvelable deux fois (soit trois années en tout). Un agent de catégorie A ne peut rester agent contractuel pendant 25 ans, de 1992 à 2017, sous le prétexte que son éventuelle titularisation est impossible pour cause d’absence de diplôme. Si la titularisation irrégulière d’un « contractuel perpétuel » a été annulée par le Conseil d’État, cet agent contractuel doit être licencié.
Alors, Aix-en-Provence et Bobigny, deux poids et deux mesures ? Que reproche-t-on réellement au maire d’Aix-en-Provence ? Qu’elle n’est pas présidente de l’Assemblée nationale ? Le « somptueux mélange d’autocratie, de népotisme et de désinvolture dans l’engagement des deniers publics » serait-il interdit la-bas, mais autorisé ici, afin de promouvoir la carrière d’un notable du Pré-Saint-Gervais, et surtout celles des personnes à qui son conseil général (désormais : conseil départemental) procure des emplois décoratifs ?